Regards croisés

Cette rubrique, qui met en parallèle des clichés pris à différentes époques, permet sous la forme de " Regards croisés " de se remémorer les heures sombres de la Villa Cavrois et de constater sa superbe renaissance.

Nous avons eu l'occasion de photographier cette maison alors qu'elle subissait les assauts des vandales et de la nature. Faut-il montrer les dégâts provoqués par des voyous irresponsables ? Le débat a tourné à l'absurde quand on pense que certains ont défendu dans le projet de réhabilitation de conserver quelques traces de tags et autres dégradations, pourquoi pas d'imondices avec les odeurs  ! Qui peut vraiment parler d'œuvre dans ce qui n'est que de la bêtise ... ?


Seule l'idée d'une pièce dite martyre, en l'occurence la chambre des jeunes garçons, a été retenue (clichés ci-dessous). Une décision qui permet de remarquer le travail caché de l'architecte dans sa conception avec ce qui est finalement une sorte d'écorché anatomique de la structure.


Toutefois cette destruction ne date pas seulement de la période qui suivit la vente de la propriété à une société immobilière qui projetait d'y faire des lotissements, avec 6 immeubles de 6 étages. En effet l'armée allemande y laissa des traces de son passage saccageur durant les années 1940 à 1944.

Les extérieurs

La façade sud


La pergola de la terrasse du dernier étage avait perdu quelques poutrelles suite aux travaux entrepris par Pierre Barbe à partir de 1945. Désormais il y a bien à nouveau 32 éléments en clin d'œil à l'année de livraison de la demeure en 1932.


Le bassin de natation


La surface du bassin de natation reflète à nouveau la façade sud de la Villa Cavrois, malgré une profondeur qui a du être revue à la baisse compte tenu des normes de sécurité imposées pour l'accueil du public.

Le parc et le miroir d'eau


Le parc a perdu la moitié de sa superficie, avec la suppression du verger, du potager, du massif des fleurs coupées, de la roseraie, de l'enclos des poules et des serres.
Le miroir d'eau avait lui aussi disparu lors de la guerre 39-45, à l'initiative de l'armée allemande qui avait trouvé cet élément trop repérable par l'aviation alliée. Il a pu être restitué  comme l'ensemble des essences d'arbres du parc au plus proche de l'état originel.


Le sous-sol ou rez-de-jardin

Le garage principal


La remise, qui pouvaient accueillir jusqu'à 8 véhicules, est devenue une salle de projection où sont diffusées différentes vidéos montrant la rénovation de la Villa Cavrois.


Le rez-de-chaussée

Le porche de l'entrée


La voûte du porche de l'entrée est éclairée naturellement par un dôme en briques de verres. Celui-ci a du être entièrement restauré avec la conception d'outils spécifiques pour extraire les éléments brisés. Des nouveaux cylindres ont été moulés et repositionnés en remplacement. Les huisseries de la porte d'entrée ont été refaites à l'identique avec le système à bascule de la poignée. Le parti pris a été de laisser le maximum de briquettes de parement en place en ne substituant que quelques éléments cassés. Ceci est particulièrement visible sur les colonnes de soutien du porche.

Le vestibule


Les boîtes à lumière, les appliques de Le Chevallier (dont 3 sur 4 sont authentiques), les miroirs, les caches radiateurs, et le globe d'éclairage redonnent sa splendeur au vestibule d'entrée. L'ascenseur de Jean Prouvé permet à nouveau de desservir les étages depuis le rez-de-jardin (le sous-sol) jusqu'au dernier étage (la terrasse - pergola, la salle de jeux et les salles d'études des enfants).


Le hall-salon


La hauteur sous plafond du grand hall-salon avait été réduite par Pierre Barbe après 1945 et la subdivision de la villa en 3 appartements (ce plafond est visible sur la photo de droite). Cette pièce a pu retrouver sa splendeur d'antan suite à la restauration du coin cheminée avec son marbre de Sienne et ses banquettes, le retour du mobilier authentique, des étagères, des caches-radiateurs et du tapis restitué.


Le cliché de gauche a été pris à la fin de la deuxième guerre mondiale, avant les transformations de Pierre Barbe, alors que la Villa Cavrois venait d'être libérée de l'occupant.

La salle à manger des parents


La salle à manger des parents a retrouvé son lustre d'antan avec la restitution de la table et du tapis début 2022. Sur les clichés de gauche pris à la libération, on découvre des éclats de tirs dans le miroir, la table est celle de la salle à manger des enfants. Cette pièce sera totalement saccagée après le décès de Madame Cavrois-Vanoutryve en 1986 avec la disparition du marbre de Suède, de l'éclairage d'André Salomon et des meubles en poirier verni.


Le fumoir


Les boiseries en acajou originel de Cuba ont été remplacées par de l'acajou du Honduras, compte tenu de la protection de cette essence d'arbre. Elles ont été associées au cuir rouge de Havane pour retrouver l'ambiance des fumées exotiques des cigares !

Le bureau


Le cliché en noir et blanc, pris en 1945, dévoile l'intérieur des armoires bibliothèques du bureau de Paul Cavrois après le passage des militaires. La rénovation de cette pièce a permis de restituer les éclairages indirects, la superbe cheminée avec son porte-bûches ... tout en laissant bien dissimulée l'armoire forte. Seules deux chaises ont pour l'instant regagnées cet espace dont il manque la partie essentielle ... le bureau !


La cuisine, l'arrière cuisine et l'office


La cuisine avec son arrière cuisine, est la seule pièce traversante de la Villa Cavrois avec la salle de bains parentale, celle-ci a retrouvé son mobilier restitué. Les 3 robinets coulent à nouveau dont celui-du milieu pour l'eau adoucie connecté à des cuves (non restituées) au sous-sol.
Dans l'Office, le meuble courbe authentique a pu retrouver sa place grâce à la générosité de Robert Rubin qui a également donné 2 tables, une dans cette pièce et l'autre dans la cuisine. L'évier en étain a pu également être restitué.


La chambre De Stijl


Les meubles de la chambre de jeune homme, dans l'ambiance De Stijl, qui était occupée par Michel le fils puiné, sont tous des restitutions compte tenu de leur destruction. Seul un chevet originel peut-être découvert dans un musée (au Vitra Design Muséum à Weil-am-Rhein en Allemagne). Le plafond noir réfléchit cette richesse de couleurs avec au centre un luminaire à éclairage azimutal reproduit à l'identique par Raphaël Armand, comme l'ensemble des globes.

Les accès aux étages

L'ascenseur de Jean Prouvé


L'ascenseur original de Jean Prouvé a du être transformé, avec l'agrandissement de la cage, pour être mis aux normes handicapées. Il permet comme à l'origine de desservir tous les niveaux du sous-sol (rez-de-jardin) au dernier étage et la terrasse-pergola. La machinerie d'époque est exposée dans l'ancienne buanderie.


L'escalier principal


Sur le cliché (en bas à gauche) fait par Véra Cardot et Pierre Joly en 1986, on constate que le cache radiateur était déjà absent. La dégradation après le décès de Lucie Cavrois-Vanoutryve cette même année ne fera qu'empirer. Les marbres de Carrare et de Groningue seront cassés, les murs tagés et la grande verrière ouverte à tous les vents et aux intempéries. En haut de cet escalier on distingue la porte d'accès au belvédère, une zone qui ne se visite pas.
Aux pires heures de la Villa Cavrois, c'est dans cet escalier qu'un arbre prendra racine !

L'escalier de service


L'escalier de service dessert tous les étages depuis le rez-de-jardin à l'exception du dernier qui correspond à la salle de jeux des enfants et à la terrasse pergola. Le monte plats permet lui de distribuer les plats depuis la cuisine située au rez-de-chaussée jusqu'à la terrasse-pergola, sans accès au sous-sol, mais avec un arrêt intermédiaire possible au premier étage, dans une pièce (qui ne se visite pas) à côté de la chambre des jeunes garçons (dite pièce martyre).

Le premier étage

Le boudoir


Le boudoir qui fut la première pièce ayant retrouvée l'ensemble de son mobilier pour l'inauguration de juin 2015 avait énormément souffert du vandalisme avec des traces d'incendie. Seule la coiffeuse est un peu différente du modèle conçue par Robert Mallet-Stevens avec l'ajout d'un tiroir par Pierre Barbe.

La salle de bains du boudoir


La Villa Cavrois comporte 7 salles de bains au total, dont une attenante au boudoir de Lucie Cavrois-Vanoutryve, contiguë à la chambre parentale. L'utilité de cette pièce répondait à " l'hygiène " l'un des 7 principes énoncés par Robert Mallet-Stevens. Geneviève, la fille aînée du premier couple, celui de Jean Cavrois avec Lucie Vanoutryve, a pu utiliser cette salle de bains (ainsi que le lit du boudoir) durant sa courte occupation de la demeure avant son mariage. C'était en effet la seule des 9 membres de la famille qui ne disposait pas d'une chambre personnelle. La photo de gauche, © Jacques Desbarbieux, a été prise lors des repérages avant les travaux de rénovation.

La chambre des parents


La chambre des parents qui avait été totalement saccagée a pu retrouver une partie de son mobilier pour l'inauguration en juin 2015. L'enfilade est une restitution, ce meuble original qui avait été transformé par Pierre Barbe a été présenté pendant quelques temps à la Villa Cavrois avant de rejoindre les réserves. 
Secondairement la table à secret est venue compléter le mobilier en bois de palmier.


La salle de bains des parents


La salle de bains des parents avait subi de gros dégâts avec la destruction des revêtements (moquette et marbres), des placards et des sanitaires.


La cabine de douche multi-jets est à nouveau fonctionnelle, à la différence du pèse personne intégré, sans doute pour éviter de trop grandes tentations de la part des visiteurs ! 


Le deuxième étage

Les salles d'étude des enfants


La salle d'études des jumelles avait été modifiée en salle d'eau par Pierre Barbe dans les transformations de la Villa Cavrois après 1945 destinées à accueillir les changements familiaux qui étaient intervenus, avec une subdivision en 3 appartements. Cette pièce a retrouvé son mobilier en attendant une rénovation plus complète.

La salle de jeux des enfants


La salle de jeux des enfants livrée aux intempéries. Les vitres sont cassées, les radiateurs arrachés et des tags commencent à apparaître. La maison n'est plus chauffée, les tuyaux de descente d'eau en fonte des terrasses sont brisés, tout cela constitue les conditions idéales du développement d'un champignon ravageur : le mérule. Aucune boiserie ne résistera.



La salle de jeux des enfants avait également été profondément transformée par Pierre Barbe après la deuxième guerre mondiale. Cette pièce était devenue un salon, guère pratique avec la hauteur des baies vitrées donnant sur le parc. Une cloison avait été posée au niveau de l'espace scénique de cette salle de jeux. Un accès se faisait au niveau de l'ancienne terrasse - pergola.


La photographie de gauche a été prise à la libération en 1945, l'année du décès de Robert Mallet-Stevens. On retrouve des éléments épars dont deux luminaires du hall-salon. Dans la Villa Cavrois, la salle de jeux des enfants, à la fin de la deuxième guerre mondiale, dévoile la triste image d'un monde absurde bien éloigné de l'innocence de l'enfant et de ses jeux.


Les troupes allemandes occuperont la villa du 28 mai 1940 au 2 septembre 1944. On sait que 200 militaires y seront logés en 1942. Elle sera réquisitionnée à la libération par les forces françaises de l'intérieur du 3 au 20 septembre 1944, puis occupée par une compagnie du train des équipages du 21 septembre 1944 au 25 juillet 1945. Toutefois Paul Cavrois ne retrouvera sa maison qu'en janvier 1947.