Le quartier Excentric

Le quartier Excentric est un petit lotissement niché au cœur de la ville de Dunkerque Rosendaël. Son créateur, François Reynaert, né à Rosendaël le 6 août 1887, dans une famille de 10 enfants est un simple maçon qui avait débuté comme aide-tisserand.

En 1927, il achète tout d'abord un terrain rue Carnot, en bordure de l'actuel quartier, pour y construire une maison qu'il baptisera « L'Escargot » . 

Naît ensuite, en 1929, une deuxième villa, « Rose Thé » connue  maintenant sous l'appellation plus simple « Les Roses » , dans le prolongement de la première, villa qui voit rapidement des propositions d'acheteurs. Reynaert décide de poursuivre les constructions et c'est ainsi que le quartier Excentric voit le jour.


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Derrière le nom Excentric se cache à la fois la position du quartier qui était excentrée, mais aussi bien entendu l'excentricité de sa réalisation !

Ce sont 35 maisons qui surgiront, il en était même prévu le double. Les premières étant construites sur des zones non ædificandi, sans permis de construire. Condamné par l'autorité militaire, François Reynaert paiera à chaque fois l'amende !


Les parapluies étaient de sortie, comme un rappel de l'ambiance du carnaval de Dunkerque !



On retrouve beaucoup d'éléments à base triple, sans rapport toutefois avec la franc maçonnerie. Sur l'immeuble « Les Disques » il y a 2 fois 3 disques.

Créateur d'une œuvre totale, François Reynaert conçoit également des ferronneries en rapport avec le thème de chacune des constructions. Des commerces verront le jour. Chaque habitation porte un nom qui sert de déclinaison. Les thèmes se rapportent soit à la nature (faune et flore) soit à la géométrie.


Notre guide nous rejoint devant la maison " Les Disques "


François Reynaert dont nous voyons un auto-portrait n'était et ne fut jamais architecte, ce qui l'empêcha de participer à la reconstruction de Dunkerque après guerre. Il fut exclus malgré les superbes projets présentés. Autodidacte, d'origine modeste, il était maçon. Très doué pour le dessin, il put partir poursuivre des études d'art à Paris, où il obtint une médaille d'or à l'exposition des arts décoratifs en 1925.

Les Disques (1930)

Cette maison en très mauvais état est située à l'angle des rues Martin Luther King et Eugène Dumez.

C'est cette construction " Les Disques "  qu'occupera François Reynaert jusqu'à la fin de sa vie, le 12 août 1958. Un magasin de disques au rez-de-chaussée fut le premier de Dunkerque.

L'intérieur de l'immeuble est décoré de dessins réalisés au " Rézo " un système de pochoir sur rame de soie conçu par François Reynaert et qui sera primé en 1925 avec une médaille d'or.


Les 3 maisons de la rue Eugène Dumez

Dans cette rue, qui est l'ancienne avenue Mollet, François Reynaert bâtira ses 3 réalisations suivantes après « L'escargot » et « Rose thé ». Il aménage des jardinets devant les constructions qui s'appelleront « Les Eglantines »« Les Cubes » et « Les Cigognes ».

Les Cigognes (1930)


Les nids de cigognes en empilement s'étendaient sur le toit terrasse, les derniers éléments ont malheureusement disparus ainsi qu'une frise végétale dans l'angle avec l'habitation mitoyenne « Les Eglantines ».


L'habitation " Les Cigognes " reprend la forme d'une aile pour les escaliers de la porte d'entrée

Les Cubes (1930)




Sur ces 3 habitations figurent les initiales de François Reynaert





Le sol et la porte d'entrée du magasin " Les Disques "


La rue Martin Luther King (dite rue A)


Juste à côté du magasin « Les Disques » , l'habitation construite par François Reynaert a été détruite lors de le deuxième guerre mondiale, touchée par la première bombe de l'opération Dynamo dans la nuit du 18 au 19 mai 1940.
Lors des bombardements ce sont 3 réalisations qui furent détruites : « Les Algues »« Les Triangles » et « Les Prismes ». Ce fut malheureusement l'occasion de constater la solidité des constructions avec l'utilisation du béton armé, et le peu de dégâts aux habitations proches de celles directement touchées.


Derrière ce garage qui prolonge l'immeuble " Les Disques " se trouvait " Les prismes " construit en 1932.


En face de l'immeuble « Les Disques » cette construction, au n° 19 de la rue Martin Luther King, qui porte le nom « Le Fusains » n'est pas de François Reynaert. Construite postérieurement, elle a été rachetée par une architecte qui l'a transformée. Quelques retouches avec l'ajout d'un balcon et d'une corniche lui donne le style du quartier Excentric.


Du côté droit de la rue Martin Luther King, dans le prolongement de la maison reconstruite à l'emplacement de celle détruite par le bombardement, on trouve une succession d'habitations qui ne devaient pas dépasser un étage, selon la règle imposée par François Reynaert.

Les Triangles et les Poissons (1931)


Le rythme ternaire se retrouve par 3 marques angulaires


Il est difficile d'imaginer l'état initial de ces deux maisons suite à la disparition de plusieurs éléments, au niveau du parapet de séparation de mitoyenneté et des toits. On devine toutefois les formes triangulaires.

Les Equerres ou Marie-Antoinette (1932)


Cette construction, dénommée « Les Equerres » a toutefois dépassé la règle avec l'ajout d'un second étage à la demande du commanditaire. Pour ne pas perdre le marché, François Reynaert a trouvé une astuce en jouant sur un décroché en forme d'escalier avec une illusion d'optique.
Son propriétaire, receveur des impôts, en changea le nom pour l'appeler du prénom de son épouse Marie-Antoinette.

Les Blocs (1932)


Cette maison possédait une surélévation qui a disparu. Initialement elle était de couleur bleue. Aucune construction n'étant classée, beaucoup d'éléments architecturaux ont été supprimé au grès du temps et des propriétaires. Selon la mode et les goûts fluctuants au détriment de l'unité et de l'essence même de la construction.

Les Grecs (1936)


Au n° 45 de la rue Martin Luther King, en face se trouve cette maison décorée de motifs grecs.



La plaque numérotée, qui est récente,  reprend avec bonheur les motifs que l'on retrouve sur la grille de la porte d'entrée, ainsi que sur le soupirail.


Les Canaris (1936)


Une petite lucarne comme la porte d'une cage et la couleur de la brique de parement sont à l'origine du nom de la maison.

Les Ecailles (1936)


On retrouve le motif des écailles sur la grille du soupirail


Le Pylône (1936)


Les courbes des toits se prolongent harmonieusement entre " Les Ecailles " et  " Le Pylône ". Les rebords en porte à faux reprennent une base triple.


AU n° 63, le nom de cette maison ne tient pas du hasard, comme à chaque fois, cela correspond à des détails de composition architecturale. Ici le pylône dont la partie basse est encore visible, était en fait un pylône électrique qui a été inclus dans la construction.


Cette photo d'époque agrandie ci-dessous montre le pylône originel



Ce luminaire n'est pas d'époque. Pendant quelques années cette maison porta le nom " Paix du soir ".


Sous le porche, sur la gauche l'inscription « Le Pylône », la grille de cette porte d'entrée dissimule sous des décorations de Noël quelques motifs.



L'arrière de la maison " Le Pylône " avec l'inscription du quartier Excentric.

L'Araignée (1931)


La dénomination de « L'Araignée », au n° 80 de la rue Martin Luther King, correspond ici à la profession du propriétaire, qui était cordier, et tissait la toile ... mais pas la toile d'araignée !



On se retrouve sur les ferronneries de la porte d'entré et du garage 3 toiles d'araignée




Entre « Les Blocs » et « L'Araignée » se trouve l'accès vers la rue Carnot où François Reynaert avait construit ses 2 premières réalisations « L'escargot » et « Rose thé ». Le portique en béton qui s'inspire du style du quartier Excentric est postérieur.


Les 2 premières constructions de François Reynaert. " L'Escargot " (à droite) qu'il habitera avant d'aller s'installer aux " Disques " et " Rose thé " (à gauche) en référence à une danseuse, dont le jupon figure sur la ferronnerie de la porte d'entrée !

Le Cygne (1933)


La construction baptisée « Le Cygne » qui comporte cet emblème sur la ferronnerie de la porte d'entrée est située étonnamment entre « L'Araignée » au n° 80 et « Suzette » au n° 86.


Le Cygne avec le reflet du Pylône en face

Suzette (1937)


Située au n° 86 de la rue Martin Luther King, cette maison est remarquable par les volutes qui sont inspirées de la forme des copeaux de bois. Un élément que l'on retrouve sur la grille de la porte d'entrée ainsi que dans d'autres réalisations de ce quartier Excentric. Ce sont 7 maisons, toutes dans les dernières constructions de François Reynaert, qui reprennent ce thème.



Cette habitation présente une triple corniche.



Vue en enfilade de la rue Martin Luther King avec de gauche à droite " Suzette " et " Le Cygne ", au centre la maison jaune " Les Blocs " à côté " Les Equerres " et " Le Baldaquin "

Les Coquelicots ou Yvette (1933)


Les éléments décoratifs, au nombre de 3, reprennent des formes de chapiteaux antiques qui font référence aux études classiques de François Reynaert. 




A droite " Le Pylône " (maison verte), de face " Les Blocs " (maison jaune), puis un groupe avec " L'Araignée ", " Le Cygne " et " Suzette ", une construction récente et un autre groupe " Les Coquelicots " (maison crème) et " Les Volutes " (maison bleue).

Les Volutes (1932)



Malheureusement cette habitation, bizarrement située au n° 130, a elle aussi perdu un triple élément décoratif en façade qui explique son appellation. Les 3 volutes furent supprimées lors de l'ajout d'un étage. On retrouve sur la grille d'entrée ces volutes qui sont une interprétation sur le thème des copeaux.


Le dancing Excentric Moulins (1939)


A l'angle des rues André Chénier et Martin Luther King se trouvait un dancing, ouvert en 1939, qui a complément disparu. Il persiste un signal, comme un totem pour se remémorer cet établissement. Sur cette emplacement ont été bâti des nouvelles constructions qui tentent de rappeler l'aspect architectural du quartier, comme ce logo.


A l'intérieur on trouve des tables excentrées et des décors inspirés d'une bande dessinée conçue par François Reynaert : Les aventures d'Alu et Mette.




Le seul élément subsistant de cet ancien dancing qui comportait à l'origine des disques excentrés. 


Entre l'ancien dancing Excentric Moulins, repérable par son signal et les Volutes (la maison bleue), une construction récente (de face) reprend des éléments architecturaux du quartier.

La rue André Chénier (dite rue B)

Les Copeaux (1932)



Un projet en 1938 transformait cette habitation en Eglise Sainte Bernadette. Les copeaux au-dessus de la porte d'entrée ont disparu.


De gauche à droite : " Les Acanthes ", " Les Oves " et " Les Copeaux ".


Les anneaux (1936)



Le rythme triennal est ici évident.



Sur la porte d'entrée la base triple, répétée plusieurs fois, est également évidente, avec 3 fois 3 anneaux dans 3 fenêtres.



Le décroché très original des 3 étages reprend le rythme triennal.


Florida (1936)



Ma Coquille (1937)


Le propriétaire de cette construction était boulanger, comme le symbolise cette coquille (non pas d'un poissonnier) mais celle de la brioche appelée ainsi dans la région.