Après l'exposition " 1925. Quand l'Art déco séduit le monde ", présentée en 2013, cette nouvelle exposition propose de continuer l'exploration de la période Art déco en faisant le récit des échanges intellectuels et artistiques transatlantiques de la fin du 19ème siècle aux années 1930.
Cette exposition montre comment le style français Art déco a influencé l'architecture, les décors, le mode de vie et le goût des Américains du Nord. Style populaire, caractérisé notamment par un travail de la ligne, de l'ornementation, des arrondis, ou encore des motifs floraux, l'Art déco va voyager de la France à l'Amérique du Nord dans un dialogue dynamique porté en particulier par les architectes.
Dès les deux dernières décennies du 19ème siècle, l'Ecole des Beaux-Arts de Paris forme une centaine d'architectes américains et canadiens. Venus trouver dans la formation française l'art de la composition et de l'ornementation, cette " Internationale des Beaux-Arts " offre les fondements des échanges à venir entre la France et l'Amérique du Nord. De retour en Amérique, ces architectes construisent et meublent des buildings Art déco dans les métropoles américaines.
Cette émulation réciproque entre la France et l'Amérique connait son point culminant en 1925 lors de l'Exposition internationale des arts décoratifs et industriels. Une délégation américaine de 104 membres y est envoyée par le secrétariat d'Etat au commerce pour observer ce " nouveau style " résolument moderne. Parallèlement, la France confie une mission diplomatique à l'Art déco, en revendique la paternité et veille à sa diffusion. Les années 20 sont ainsi marquées par les aller-retours : les architectes français qui construisent sur le continent américain sont de plus en plus nombreux (Paul Cret et Jacques Greber à Philadelphie, Jacques Carlu enseigne au MIT...)
Clé de voute de tous les arts, l'architecture entraine des évolutions stylistiques dans de nombreuses professions : peintres, sculpteurs, ensemblier, ferronniers, muralistes font corps avec les bâtiments et accompagnent en la sublimant cette toute nouvelle architecture. A leur suite, la mode, la joaillerie et les arts de la table s'inspirent de ce nouveau style dont les lignes simples et fluides contrastent avec la période précédente de l'Art nouveau.
Cette dynamique est brisée par la crise économique de 1929, les architectes français rentrent en France. En 1934, Jacques Carlu se voit confier le projet du palais du Trocadéro et pense sa modernisation en s'appuyant sur ses souvenirs américains. Les travaux font naître un nouveau bâtiment, l'architecte articule son projet autour de la création d'une esplanade et la percée d'une perspective grandiose sur la ville et la Tour Eiffel, encadrée par un bâtiment aux proportions américaines : l'art déco a retraversé l'océan.
Avec un parcours inédit, s'intéressant à l'architecture, mais aussi à l'ensemble de la vie culturelle et artistique de cette période foisonnante, l'exposition Art déco France-Amérique du Nord se fait le reflet du dialogue incessant de ses années entre la France et l'Amérique autour du style Art déco.
Au nom d'une amitié
C'est avec Pierre-Charles L'Enfant, engagé volontaire dans les troupes du général La Fayette, que s'ouvre la voie de l'influence française sur l'urbanisme et l'architecture aux États-Unis. À la suite d'un concours remporté en (effacé), George Washington lui confie le dessin du plan de la capitale fédérale.
L'Amérique, qui a adopté l'architecte français, lui rendra hommage au cimetière d'Arlington en 1909. Son tombeau, une élégante table sur quatre pieds balustres gravée du plan de Federal City, est réalisé par l'architecte William Welles Bosworth. Ce geste confirme qu'une amitié « constructive » est désormais scellée entre les deux nations.
Bosworth s'est formé aux Beaux-arts de Paris.
Architecte du campus du Massachusetts Institute of Technology de Boston, il devient, après une magistrale carrière aux États-Unis, l'homme essentiel du rapprochement des deux cultures. Il adore la France et y élit domicile. Proche de John D. Rockefeller Jr., Bosworth suit le financement des actions du puissant mécène en faveur de la cathédrale de Reims, du château de Versailles, du musée du Louvre et de l'Ecole américaine de Fontainebleau. Cette dernière, ouverte en 1923, a été voulue par Lloyd Warren, fondateur du Beaux-Arts Institute of Design de New York. Dirigée dès sa création par le jeune prix de Rome Jacques Carlu, elle devient la tête de pont d'échanges féconds entre les jeunes architectes en formation.
Les premiers gratte-ciel fascinent
« Les gigantesques édifices américains, dont on ne peut nier la beauté, sont nés sur la rive gauche de la Seine de 1890 à 1910 », remarque le pionnier de l'aviation Gabriel Voisin. Constat partagé par l'historien
Louis Réau: « Les gratte-ciel de New York et de Chicago n'ont rien de commun avec l'architecture française moderne et cependant ils sont l'œuvre d'anciens élèves de notre École des beaux-arts ». Les Français sont surpris par ce qu'ils voient. Le graveur Émile Laboureur, à New York dès 1904, trouve un certain charme à cette démesure.
Mais tout cela est-il bien raisonnable?
L'architecte Louis Bonnier résume la situation avec son collage juxtaposant la cathédrale Notre-Dame et le Woolworth Building de New York. Les gratte-ciel fascinent mais n'arrivent pas à convaincre totalement.
Est-il bien raisonnable de percher des gargouilles gothiques à plus de 150 mètres de hauteur? On admire les performances mais il faudrait que les étudiants américains s'assagissent et pensent à un autre décor.
La solution viendra de l'Art déco.
L’escadrille Lafayette
Une année avant l'entrée en guerre des États-Unis et l'arrivée sur le sol européen de près de deux millions de sammies, de jeunes pilotes volontaires américains, pour certains issus de riches familles francophiles et tous désireux de combattre aux côtés de la France, s'engagent sous l'uniforme français au sein de la célèbre escadrille américaine N 124, baptisée Lafayette Flying Corps, en décembre 1916.
Ces pilotes, emmenés par le jeune Norman Prince installé en France, prennent pour emblème une tête de chef indien qu'ils peignent sur leurs carlingues. Elle symbolise leur détermination et leur courage et devient, dans les années 1920, un motif récurrent de la décoration des gratte-ciel, des gares et des bâtiments publics Art déco.
Ce motif décoratif est magnifié au mémorial édifié en 1928 non loin de Paris, dans le parc de Saint-Cloud, à la mémoire des 68 pilotes de l'escadrille disparus lors des combats : sculptés aux frontons des pavillons d'angle par Marcel Renard et Ernest Dubois, fondus en bronze sur les grilles d'accès à la crypte-sanctuaire, figurés en couleur dans une étonnante mosaïque de sol. En 1927, le sculpteur américain René Paul Chambellan l'utilise, très stylisé, pour la Home Savings Bank à Albany, de l'architecte Frederic C Hirons ; en 1930, sculptée en nickel par David Evans, elle orne le City Bank-Farmers Trust Company Building à New York, des architectes Cross & Cross. Pour le Cincinnati Union Terminal de l'architecte Paul Cret, c'est en mosaïque que Winold Reiss réalise le portrait du chef indien Mike Little Dog.
Anonyme -Carlingue d'avion décorée de l'emblème de l'escadrille La Fayette: Tête de sioux
À la création de l'escadrille, chaque pilote adopte un emblème personnel qu'il fait figurer sur la carlingue de son avion: l'initiale de son nom ou un dessin (un dé, un pied, une étoile). C'est en octobre 1916 que le capitaine Georges Thénault, commandant de l'escadrille, choisit un emblème d'unité collectif: une tête de chef Indien. Dessiné par le soldat mécanicien Marie Suchet, c'est l'adaptation du dessin imprimé sur les boîtes de munitions de la marque Savage Arms Manufactured Company.
En février 1917, un second emblème collectif est adopté: une tête de Sioux, dessinée par le sergent pilote Harold Willis.
Frederic C. Hirons (1882-1942), architecte
Le Beaux-Arts Institute of Design de New York, 304 East 44th Street, 1928
En 1928, Frederic C. Hirons remporte le concours pour la nouvelle façade des locaux du Beaux-Arts Institute of Design. Ancien élève de Victor Laloux à Paris et Paris Prize 1906, il est à la tête d'un important atelier à New York. Pour animer sa façade, il fait appel au sculpteur américain Rene Paul Chambellan qui imagine des panneaux en terre cuite polychrome représentant le Parthénon d'Athènes, l'École des beaux-arts de Paris et Saint-Pierre de Rome.
Le moment 1925 et son influence
En 1925, la société a changé : il faut être « moderne ». Désormais, on roule vite et on vole toujours plus loin, à partir des nouveaux aérodromes. Le président du Conseil Paul Painlevé, qui accueille la délégation américaine à l'Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de Paris en 1925, est un savant émérite. Il a très tôt démontré que la mécanique des fluides rendait possible le vol du plus lourd que l'air. C'est pour cette raison qu'il a tenu à être le premier passager français de l'aéroplane de l'Américain Wilbur Wright, dès 1908, et de celui du Français Henri Farman, en 1912.
Le ministre est donc tout aussi « moderne » que les créations dont il va faire la « réclame ».
Malgré une intense campagne de lobbying diplomatique, le gouvernement américain a renoncé à présenter un pavillon national à l'Exposition, considérant qu'il n'a rien de convaincant à présenter à Paris. Le secrétaire d'État au commerce, Herbert Hoover, décide néanmoins d'envoyer une importante délégation d'observateurs représentant une trentaine de corporations. Le 19 avril 1925, le New York Times donne la liste des participants qui voguent vers Cherbourg à bord du paquebot George Washington : entrepreneurs du textile, du mobilier, du papier peint, de l'éclairage, de la joaillerie et de la couture, suivis par des journalistes de Vogue et de House & Garden.
Ils resteront deux semaines à Paris, logés à l'hôtel Continental. De retour aux États-Unis, un rapport complet est remis à Hoover et distribué gratuitement sur tout le territoire, accompagnant des expositions de produits modernes français. Le 20 mars 1925, le chroniqueur du New York Times avait écrit qu'il attendait de ce rapport des idées inspirantes venues « de l'aptitude française à saisir l'air du temps ».
L’Exposition de 1925 à Paris
L'Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes ouvre ses portes le 28 avril 1925. Elle est inaugurée devant 4 000 invités par le président de la République Gaston Doumergue. Cent cinquante pavillons et galeries abritent l'œuvre de 20 000 personnes. Une fois n'est pas coutume, la France a su se vendre. Le catalogue officiel de l'Exposition est édifiant quant à la place offerte aux annonceurs : United States Line, American Express Travel, Royal Bank of Canada. Tout a été fait pour attirer un public le plus large possible qui peut se transporter sur l’Electrocar Renault, un modèle torpédo à huit places qui possède un moteur électrique. Les Journalistes des quotidiens du monde entier applaudissent. Le New York Times publie une centaine d'articles, de février à septembre 1925. Le plus dithyrambique des reporters est Edgar Miller présentant Paris comme « The Prophetic City ».
Pour l’architecte Frantz Jourdain en 1926, c’est un succès mérité : « Il a donc fallu l'Exposition de 1925 pour conquérir l'adhésion populaire à l'Art du XX° siècle ?
Or ce triomphe si péniblement obtenu, car la lutte a été âpre et longue, c’est, en grande partie, au Groupe des architectes modernes et à la Société des décorateurs qu’on le doit, car ce sont eux qui ont et les instigateurs et, pour ainsi dire, les metteurs en scène de la somptueuse féérie dont le monde conservera un impérissable souvenir ».
La suite de l'Exposition, nombre de créateurs participent à l’aménagement des paquebots, Île-de-France, en 1926 et Normandie en 1935, véritables ambassadeurs des mers. Ils vont exporter le gout français et le savoir-faire hexagonal.
En 1925, le pavillon de la Société des artistes décorateurs s’intitulait justement « L'Ambassade française ». La France confiante et déterminée a voulu séduire.
L'ambassade du Mexique
En témoignage de ses liens anciens avec la France ainsi que de ses ambitions issues de la récente révolution. le Mexique engage en 1926 à Paris un double chantier diplomatique.
Sous la supervision d'Alberto Pani, nommé ministre plénipotentiaire du Mexique en France en 1927, une spectaculaire ambassade, intégralement Art déco, est édifiée rue de Longchamp dans le 16ème arrondissement par l'architecte français André Durand.
Parallèlement, le Mexique installe la résidence de son ambassadeur à proximité immédiate, dans un hôtel particulier préexistant de l'avenue du Président-Wilson.
Pour les deux vastes salons en enfilade, Pani commande 18 grandes toiles au peintre muraliste mexicain Ángel Zárraga.
Angel Zárraga, marié à une footballeuse russe Jeannette Ivanoff, s'installe dans la capitale avant-guerre. En 1919 à l'Art Training Center de Meudon-Bellevue, il aide l’américain Ernest Peixotto à faire découvrir et comprendre aux étudiants soldats la peinture moderne en pleine effervescence à Paris. Ami de Diego Rivera et d'Alexandre Zinoview, il peint des sujets religieux : à la chapelle du sanatorium Martel de Janville, en Haute-Savoie, et dans des églises de la banlieue parisienne comme à Gentilly, Suresnes et Meudon. Dans la capitale, place de l'Opéra, il décore à fresque la Maison du café de l'architecte Charles Siclis.
Son chef-d'œuvre est ce grand programme décoratif qu'il réalise pour la légation des États-Unis mexicains : un hymne à l'amitié des deux pays ou figure la France, « rose du monde ». Des allégories de l'origine et de l'histoire du Mexique alternent avec des évocations - traditionnelles ou très actuelles - de la France et du rêve mexicain de fraternité universelle.
Ángel Zárraga (1886-1946)
Amaos los unos a los otros
[Aimez-vous les uns les autres]
Huile sur toile, vers 1926
Collection du ministère des Affaires étrangères mexicain à la garde de l'Ambassade du Mexique en France, inv. 00635P
Angel Zárraga (1886-1946)
El cuerno de la abundancia
[La corne d'abondance]
Huile sur toile, 1927
Collection du ministère des Affaires étrangères mexicain à la garde de l'Ambassade du Mexique en France, inv. 00636P
Angel Zárraga (1886-1946)
Francia, la rosa del mundo
[La france, la rose du monde]
Huile sur toile, 1927
Collection du ministère des Allaire étrangères mexicain à la garde de Ambassade du Mexique en France, inv 01758P
En route pour l’Amérique le style paquebot inspire
Aux Américains du Nord qui n'ont pas été à l'Exposition de 1925, les paquebots de la Compagnie générale transatlantique l’Île-de-France (1927) et Normandie (1935) font office d'ambassades flottantes du « nouveau style », symboles d'une époque et d'un art du voyage à la française.
De très nombreux artistes - ferronniers, ébénistes, architectes, sculpteurs, peintres, décorateurs - collaborent à la conception et à la réalisation des programmes décoratifs de ces deux géants des mers.
Pour la première fois, le trait d'union entre Vieux Continent et Nouveau Monde n'est pas une image des temps anciens, mais celle de la modernité la plus audacieuse.
Île-de-France réunit entre autres Louis Süe, André Mare, Jacques-Émile Ruhlmann, René Prou, Raymond Subes, René Lalique, ou encore Alfred Janniot et Henri Navarre.
Les convives de la salle à manger de la première classe, conçue par Pierre Patout, peuvent y apprécier les grands panneaux d'Edy-Legrand, de Léon Voguet, de Georges Lepape, de Jean Dupas ou de Mathurin Méheut. C'est sur ce même paquebot que Jacques Carlu trouve l'inspiration pour l'aménagement du grand restaurant du magasin Eaton de Montréal (1930-1931).
La salle à manger de la première classe du transatlantique y est déclinée presque à l'identique par Carlu qui confie le grand mural de l'entrée du restaurant à son épouse Natacha Pecker, dite Anne Carlu, et les bas-reliefs aux sculpteurs Denis Gélin et Alfred Bottiau. Carlu, en homme d'amitié, les réunira de nouveau tous au palais de Chaillot en 1937.
Pierre Patout (1879-1965), architecte, établissements Neveu et Nelson, ébéniste, et établissements Brunet-Meunie, tapissier
Fauteuil de la salle à manger des premières classes du paquebot Île-de-France
Sycomore, tapisserie d'Aubusson de coton, vers 1927
Saint-Nazaire Agglomération Tourisme - Écomusée, inv. 994.7.18
Albert Sébille (1874-1953)
Écorché d'ile-de-France: plan en coupe du paquebot qui servit pour imprimer les dépliants disponibles à bord.
En 1926, l'Île-de-France est le premier des paquebots transatlantiques à présenter un décor Art déco. Sa salle à manger va inspirer à Carlu son célèbre restaurant pour les magasins Eaton à Montréal et toute une génération d'architectes américains. Son salon de thé rassemble les hérauts de l'Exposition internationale de 1925 à Paris, Pierre Patout, Jacques-Émile Ruhlmann, Jean Dupas et Alfred Janniot.
Facsimilé d'après la gouache sur papier originale, 1927
© Musée maritime et portuaire du Havre, inv. 83.74, photographie d'Hervé Lewandowski, 2022
Le gratte-ciel new-look
Il est certain que les Américains n'ont nul besoin de la France pour édifier leurs époustouflants buildings, excellant dans la standardisation des procédés de construction. Leur quête est ailleurs : donner à leurs gratte-ciel une nouvelle peau.
À Cornelius Vanderbilt Jr., du New York Times, venu l'interviewer, Paul Iribe, qui s'apprête à transmettre ses idées à Hollywood, résume admirablement le sujet dès 1920 : « J'ai une plus grande leçon à recevoir des gratte-ciel, de Broadway illuminé la nuit, du tumulte de New York que de la place Vendôme à Paris ; la nouvelle forme d'art que nous attendons impatiemment, viendra d'ici, de votre merveilleuse Amérique... Broadway la nuit est la chose la plus originale que je connaisse. Je ne plaisante pas. Je ne dis pas que j'aime l'enseigne qui fait de la réclame pour du chewing-gum ou des bas. Je songe à l'ensemble. Je suis plus apte à admirer l'Amérique que la plupart des Américains car je suis étranger... Je tiens à vous dire que vous êtes en train de créer chaque jour quelque chose de nouveau, quelque chose d'irrésistiblement charmant. Je pense que votre pire ennemi ici, pour être franc, est le mauvais goût... Vous avez tout créé sauf le goût. Vous vous servez de vos idées modernes avec les goûts de notre Vieux Monde, et ils ne conviennent pas. Une nation aussi neuve et magnifique doit créer son propre goût ».
L'Art déco, observé par les Américains à Paris en 1925, renouvelle la donne. À l'École des beaux-arts, William Van Alen a appris mais aussi senti, le premier, les nouvelles idées de la France des années 1920. Adieu le gothique ou le néo-roman ! Son Chrysler building au casque d'acier géométrique est aujourd'hui l'emblème de l'Art déco américain. Parmi les artistes français, Bernard Boutet de Monvel saura le mieux traduire la beauté de ces nouvelles architectures.
Séduction transatlantique
Depuis le début du siècle, Paris donne sans conteste le ton de la séduction. Le monde envie l'inventivité de ses créateurs. Couturiers, créateurs d'accessoires de mode, parfumeurs, cosméticiens, tous ont à cœur de rompre avec la tradition et de s'inscrire dans la modernité.
Certains nouent très tôt des relations privilégiées avec les États-Unis et mènent une carrière des deux côtés de l'Atlantique.
Dès 1912, Jeanne Paquin fonde une succursale à Manhattan, sur la 5e Avenue, pour exposer ses fourrures. Un an plus tard, Paul Poiret effectue une tournée promotionnelle aux États-Unis et fait reproduire quelques modèles auprès d'un détaillant new-yorkais. Les costumes de bain de Schiaparelli sont importés en exclusivité par Saks Fifth Avenue, les toilettes de Madeleine Vionnet diffusées par Wanamaker's. À Chicago, Marshall Field's déploie une French room qui accueille les robes de cocktail de Lucien Lelong, « le plus américain des couturiers français ».
En 1924, Jean Patou part outre-Atlantique recruter six mannequins qui inspireront les élégantes originaires des États-Unis fréquentant ses salons.
Les parfumeurs François Coty, Jean Patou, Lucien Lelong, les parfums D'Orsay ou Bourgeois inventent une nouvelle parfumerie de luxe, aux fragrances complexes et raffinées, dont les flacons et emballages sont les ambassadeurs. Coty fait appel à René Lalique pour la création de ses flacons.
En 1913, les parfums Coty élisent domicile à New York, sur la 5e Avenue. La place essentielle prise par le maquillage sur le marché américain l'incite à développer des gammes de poudres et de rouges à lèvres assorties à ses parfums. Le succès est au rendez-vous !
L'Upper Class
Au lendemain du conflit mondial, l'upper class nord-américaine, francophile et francophone, devient l'une des meilleures ambassadrices du nouveau style Outre-Atlantique. Les milliardaires américaines comme Barbara Hutton, héritière de la chaîne de magasins Woolworth, ou Daisy Dellowes, petite-fille Singer, les rédactrices en chef de Harper's Bazaar ou de Vogue, l'emblématique chroniqueuse du New York mondain Diana Vreeland ne portent que les créations des maisons de mode et de joailleries françaises.
La journaliste californienne Thérèse Bonne fait le lien entre Paris et l'Amérique en créant une agence de presse à Paris, tournée vers les arts décoratifs et l'architecture. Elle publie de nombreux articles et rédige son bestseller A shopping Guide to Paris en 1929.
Les capitaines d'industrie et milliardaires tels la famille du Pont de Nemours, Albert C. Barnes ou encore William Randolph Hearst font appel aux artistes français pour décorer leurs demeures.
Pendant que l'une des figures mythiques de cette upper class, la New-Yorkaise Peggy Guggenheim, installée en France, soutient artistes et créateurs, Bernard Boutet de Monvel devient le portraitiste le plus demandé par la Café Society. Ses modèles se nomment Frick, du Pont de Nemours, Vanderbilt. Sa renommée outre-Atlantique n'est plus à faire: dès 1907, ses œuvres sont régulièrement présentées aux expositions du Carnegie Institute de Pittsburgh ainsi que dans des galeries new-yorkaises. Ce dessinateur de mode remarquable collabore avec Paul Poiret ainsi qu'à de nombreuses revues de mode françaises et américaines - la Gazette du bon ton, Femina, Harper's Bazaar. De 1926 à la guerre, il fait l'objet de nombreuses rétrospectives aux Etats-Unis.
L’Art déco en Amérique
Dès 1926, c'est l'effervescence dans les grands magasins américains. Les enseignes Eaton, Lord & Taylor, Macy's, Wanamaker's, James Oviatt, Cheney Brothers, Stewart and Lo s‘emparent des nouveautés et présentent des vitrines confiées à de jeunes designers français ou américains : Jacques Carlu, Raymond Loewy ou Donald Deskey.
Lewis Rodman Wanamaker réside à Paris. Il en fait le centre de ses achats pour plus de dix millions de francs chaque année. Marie à une Française, il habite les Champs-Élysées en face de son ami Gordon Bennett dont il partage les goûts pour les aéroplanes.
Son spectaculaire magasin de Philadelphie est souvent décoré par des Français comme Henri Marret. La maison Macy's, plus grande surface commerciale de New York s'est modernisée et arbore des ascenseurs aux grilles Art déco remarquables. Elle propose du mobilier de Jules Leleu ou Paul Follot, devenu directeur artistique de la firme anglaise Waring & Gillow.
En 1928, le magasin Stewart and Co. de New York est construit par Whitney Warren. Le building est sobre, orné seulement de deux bas-reliefs aux danseuses de René Paul Chambellan. Plusieurs architectes aménagent les étages dans une ambiance moderniste de bois exotiques : Franklin Whitman, ancien élève de l'Art Trainina Center de Meudon : Eugène Schoen, influencé par l'Exposition de 1925 à Paris.
Au cinquième, Jacques Carlu a des alcôves luxueuses, confiant à son épouse Anne la décoration de celle dévolue aux parfums D'Orsay : une Diane chasseresse maniériste. Les arts de la table, la maroquinerie, la mode, le parfum, on trouve de tout dans ces temples de la consommation. Des « influenceuses » comme Thérèse Bonney, sont les ambassadrices du bon goût français. Pour fidéliser les clientes de l'upper class, sa sœur Louise organise les visites des nouveaux paquebots Art déco lorsqu'ils sont en escale à New York.
(1) Lucien Lelong (1889-1958), couturier-parfumeur
Deux boîtes à poudre pour la coiffeuse
Lucien Lelong, considéré comme « le plus américain des couturiers français », entreprend son premier voyage transatlantique en 1925, mandaté par le gouvernement français, afin de comprendre les clés de la réussite de l'industrie américaine du prêt-à-porter. Le couturier, conquis par l'American Way of Life, partagera dès lors son temps entre la France et les États-Unis. En 1935, Lelong commercialise enfin un premier parfum grand public : l'Indiscret.
Métal blanc laqué rouge et noir, vers 1930
Collection JM Martin-Hattemberg
(2) Lucien Lelong (1889-1958), couturier-parfumeur, et René Lalique (1860-1945) (attribué à), maître-verrier
Coffret de Parfum A
Métal laqué noir, 1935
Collection JM Martin-Hattemberg
(3) Lucien Lelong (1889-1958), couturier-parfumeur
Deux poudriers compacts
Métal blanc laqué noir et rouge, vers 1930
Collection JM Martin-Hattemberg
Décor du « corner-écrin » des parfums D'Orsay des grands magasins Stewart and Co. de New-York, par Jacques Carlu (1890-1976),1928-1930
Tirage numérique moderne d'après un document original, n.d.
© Paris, SIAF / Cité de l'architecture et du patrimoine / Archives d'architecture contemporaine, fonds Jacques Carlu, inv. D-10-10-004
Anne Carlu (1895-1972)
Diane chasseresse
Fragment du décor du « corner-écrin » des parfums D'Orsay du grand magasin Stewart & Co. de New York
En 1917, l'architecte Jacques Carlu épouse Natacha Pecker, dite Anne Carlu. Cette fresquiste talentueuse participe à la décoration de tous ses chantiers : à Montréal et Toronto pour les restaurants des grands magasins Eaton (1929) ; à Bruxelles pour le pavillon de la France (1935) ; à Paris pour le théâtre de Chaillot (1937). Plutôt maniériste, elle campe une Diane chasseresse très botticellienne pour le rayon parfumerie des grands magasins Stewart
de New York.
Huile sur papier, marouflé sur bois, 1927
Boulogne-Billancourt, musée des Années Trente / MA-30, inv. 2013.0.9
Les Muralistes
Certains visiteurs américains de l'Exposition de 1925 sont subjugués par ce qu’ils y découvrent en matière de peinture murale. Rodman Wanamaker, le très enthousiaste directeur des magasins du même nom demande à Octave Guillonnet et Henri Maret de copier à l’identique leurs fresques de la cour des Métiers pour les présenter dans son grand magasin de Phidadelphie. Georges Desvallières, présent à l’église du Village français, se voit confier la décoration de l’église Saint-Jean-Baptiste de Pawtucket, à Rhode Island en 1926.
Cédric Gibbons, directeur artistique de la Paramount, est séduit par Jean Dupas, découvert dans le pavillon de Ruhlmann. Des toiles de l’artiste figureront dans presque tous ses films hollywoodiens. Louis Pierre Rigal, auteur du plafond du grand salon de Ruhlmann, est repéré par les architectes Schultze et Weaver pour la décoration de leur nouvel hôtel de prestige, le Waldorf-Astoria de New York. Il est chargé des fresques du grand hall ainsi que de la mosaïque spectaculaire de son sol. Le célèbre hôtel sera la résidence permanente du président Hoover pendant trente années. Celui qui a contribué à taire connaitre l’Art déco français aux États-Unis n'a sans doute pas choisi sa résidence au hasard.
Mathurin Meheut, à bord d'Île-de-France avec son élève Yvonne Jean-Haffen vogue vers les États-Unis en 1930 pour exécuter à Pittsburgh en Pennsylvanie la décoration du siège social de l'empereur du ketchup Howard Heinz.
Parmi les muralistes français, certains font souche aux États-Unis : Robert La Montagne Saint Hubert et Jean Despujols, tous les deux professeurs à l’École américaine de Fontainebleau. L’atelier de Despujols est désormais conservé dans sa totalité au Shreveport Meadows Museum, en Louisiane.
Jacques-Émile Ruhlmann (1879-1933)
Commode au char ou Meuble au char
Le Meuble au char, en ébène de Macassar, est l’une des plus célèbres créations de Ruhlmann. Conçu en 1917, il reçoit un décor d’ivoire dont ce char d’Apollon dessiné par Maurice Picaud, élève de l'école Boulle et jeune collaborateur de l’ensemblier.
Sous le pseudonyme de « Pico », l'artiste dessinera la fameuse danseuse de la façade
Des Folies Bergère à Paris. Le Meuble au char est choisi par
Ruhlmann pour le représenter dans les grands magasins américains, dès 1926.
Ébène vers 1930
Musée des années 30 de Boulogne Billancourt
Maison Dœuillet-Doucet
Robe de mariée (?) griffée
La maison Dœuillet-Doucet est née du regroupement des deux maisons éponymes par l'industriel et financier français Georges-Édouard Aubert (1869-1933), grand ami du couturier Georges Dœuillet (1865-1934). Conseiller au commerce extérieur, il effectue de nombreux voyages aux États-Unis et convainc son ami Benjamin Guggenheim (père de Peggy) d'investir dans la maison Dœuillet dès 1911. La nouvelle maison Dœuillet-Doucet est mise en bourse en mai 1928 et cesse ses activités en 1937.
Fond de robe et robe en soie ivoire brodée, agrémentée de pans de dentelle et filet orné de perles d'imitation, ceinture asymétrique avec broderies et passementeries agrémentées de strass, 1928-1930
Collection A & F Camilli
Travail américain ou français
Robe sans manche brodée de motifs d'oiseaux
Mousseline de soie brodée de perles et baguettes de verre, vers 1925
Collection A Camill & Cie
w. studios, photographes
L'art de la table
En 1928 et 1929, l'American Federation of Arts organise une grande présentation des meilleures productions des arts de la table européenne, « The International Exhibition of Ceramic Art », qui fait sensation dès son ouverture au Met de New York le 1er octobre 1928. Elle réunit 404 créations de huit pays. Après New York, l'exposition circule sur toute la côte est et autour des Grands Lacs jusqu'en septembre 1929.
Le public américain y découvre entre autres les créations Art déco de Jean Luce, René Buthaud, Canto da Maya, Suzanne Lalique, ainsi que celles de la Manufacture de Sèvres et des ateliers de décoration des grands magasins parisiens. Institutions et particuliers achètent des pièces. Le nouvel art de la table se diffuse à travers tout le pays.
Déjà remarqué, en 1922, par Joseph Breck qui acquiert pour le Metropolitan de New York quelques-unes de ses créations, c'est en 1934 que René Buthaud est sollicité par une galerie new-yorkaise pour réaliser des pièces à « peau de serpent » et aux décors d'inspiration cubiste ou abstraite. Sous contrat avec la galerie Rouard, Buthaud signe alors ses œuvres américaines Doris ou J. Doris, en référence au céramiste grec Douris. Elles sont exportées aux États-Unis jusqu'en 1939.
Quant au créateur de services de table Jean Luce, c'est l'Exposition de 1925 qui lui permet de traverser l'Atlantique. Il y séduit une riche clientèle nord-américaine avec son célèbre service Corbeille. Dans les années 1930, le nouveau service Rectangulaire prend le relais du succès. Entre 1926 et 1929, les expositions itinérantes de l'American Federation of Arts et celles des grands magasins américains lui assurent un vaste réseau de distribution et un succès remarquable. Son fichier de clients mentionne les Guggenheim, l'homme d'affaires James Oviatt, ou encore la vedette de cinéma Ramon Novarro.
Alfred-Alphonse Bottiau (1889-1951)
L'inspiration
Maquette de mise au point pour la sculpture du fronton du pavillon de Tête de l'aile Paris du palais de Chaillot
Alfred Bottiau reçoit de nombreuses commandes aux États-Unis : pour Paul Cret, rencontré grâce aux projets de l'American Battle Monuments Commission en France, il réalise des bas-reliefs pour les bâtiments de l'integrity Trust Company (1929) et l'Old Federal Reserve Bank (1931-1932) à Philadelphie ; à Hartford (Connecticut), il est l'auteur des sculptures du palais de justice (1927-1929) et de l'Hôtel de ville (1931)
Pour Carlu, son condisciple à la Villa Médicis, il crée des bas-reliefs pour le restaurant des grands magasins Eaton de Montréal (1930)
Plâtre et bois, 1937
Valenciennes, musée des Beaux Arts, Inv. 5.90 97
Anne Carlu (1895-1972)
Maquette du rideau de scène du Théâtre de Chaillot
Huile sur carton, 1936
Boulogne-Billancourt, musée des Années Trente / MA-30,
inv. 2000.22.1
Miami Beach L'Art déco devient Tropical déco
Parmi les villes américaines, Miami Beach constitue le meilleur représentant de ce basculement vers un democratic Art déco.
Station touristique très fréquentée, Miami Beach prend dans les années 1930 le virage du très grand luxe pour milliardaires vers un style balnéaire destiné à Monsieur Tout-le-Monde. Après l'ouragan de 1926, tout est à reconstruire - comme après le tremblement de terre de 1931 à Napier, en Nouvelle. Zélande - et les promoteurs choisissent l'Art déco, mais dans une formule simplifiée et « streamlinisée ». Les immeubles de rapport et les hôtels, d'une hauteur modeste de quatre à six étages, se terminent par un toit-terrasse adapté au climat, particularité que certains baptisent Tropical Deco.
Ils présentent des fenêtres filantes souvent couronnées de pare-soleil aux lignes arrondies tout le long de la façade. Cette dernière est souvent séparée en son centre par une grande verticale de béton sur laquelle s'inscrit la fonction du bâtiment, comme pour le Colony Hotel de l'architecte Henry Hohauser.
À Miami, sur une longue période s'étendant jusqu'aux années 1950, d'autres architectes comme Lawrence Murray Dixon, Roy F. France, Albert Anis, Igor Polevitzky, un élève de Paul Cret, signent des bâtiments remarquables qui sont aujourd'hui protégés grâce au travail de la première des Art déco societies américaines, fondée à Miami en 1976 par Barbara Baer Capitman.
Le boxeur Marcel Cerdan
La Grande Dépression a un impact important sur les carrières des architectes français expatriés. Sans travail aux Etats-Unis, certains décident de rentrer en France, comme Jacques Carlu, en 1934. Approché par son ami Georges Huisman, devenu directeur des Beaux-Arts sous le Front populaire, Carlu se voit confier la responsabilité du palais du Trocadéro à Paris en tant que conservateur en chef de l'édifice. C'est à ce poste stratégique qu'il mûrit sa réflexion sur le devenir et la modernisation du bâtiment qui lui a été confié.
Comme par un effet de boomerang, s'appuyant sur le souvenir de ses propres réalisations américaines et de ses projets non aboutis, de son expérience auprès de confrères aguerris comme Paul Cret et Withney Warren, Jacques Carlu propose en 1935 à sa tutelle, après bien des atermoiements et concours avortés, les plans du nouveau palais de Chaillot, un ensemble très convaincant à l'allure toute « washingtonienne ». Il doit remplacer le très polémique et si malaimé palais du Trocadéro de 1878 pour l'ouverture de l'Exposition internationale des arts et techniques dans la vie moderne qui doit débuter le 25 mai 1937.
Sous la magnifique esplanade dégageant opportunément la vue vers la tour Eiffel et Paris, le Théâtre national populaire, tant voulu par le ministre de l'Education nationale et des Beaux-Arts Jean Zay, est salué par la presse, qui le qualifie de « Normandie des théâtres ». L'Art déco a retraversé l'océan !
Cuiseur à dinde
Zephyr Schlenzig Mfg. Co
Aluminium, vers 1935-1940
Petaluma, Ca, USA- Eames Institute - Collection Jean Bernard Hebey,
HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
De haut en bas et de gauche à droite
Ensemble de micros Streamline
Acier chromé, vers 1935-1945
Petaluma, Ca, USA - Eames institute - Collection Jean Bernard Hebey.
HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Tourne disque
Marque Odeon, système de reproduction Vadasz
Oskar Schlemmer (1888-1943)
Métal laqué, laiton chromé, bois laqué noir, vers 1928
Circa 1928
Petaluma, Ca, USA - Eames institute - Collection Jean Bernard Hebey.
HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Jukebox Seeburg 100 Wall-O-Matic, jukebox de table
Seeburg
Acier chromé, verre, vers 1949
Petaluma, Ca, USA - Eames institute - Collection Jean Bernard Hebey.
HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Tourne-disque portable
John Vassos (1895-1985), designer
RCA Victor Radio Company America, US, fabricant
RCA Victor Special Portable Phonograph
Aluminium, acier, velours, plastique, vers 1935
Petaluma, Ca, USA - Eames institute - Collection Jean Bernard Hebey.
HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Aspirateur-Balai modèle n° 150
Henri Dreyfuss (1904-1972), designer
Hoover Company (North Canton, Ohio), fabriquant
Acier, acier émaillé, aluminium, toile, caoutchouc, bakélite, vers 1936
Petaluma, Ca, USA - Eames Institute -Collection Jean Bernard Hebey, HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Luge Skippy Sno-Plane
Harold L. Van Doren (1895-1957) et John Gordon Rideout (1898-1951), designers
Contreplaqué, acier émaillé et chromé, plastique, vers 1933
Petaluma, Ca, USA - Eames Institute -Collection Jean Bernard Hebey, HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
La caravane Airstream Liner
tractée par le cycliste Alfred Letourneur (1907-1975)
Wally Byam (1896-1962)
Tirage numérique moderne d'après un cliché original, 1947
© Courtesy of Airstream Inc.
Moteur de hors-bord, modèle Mihajlo Bucinski, Waterwitch
John R. Morgan (1903-1986)
Aluminium, acier, laiton et caoutchouc, vers 1937
Petaluma, Ca, USA - Eames Institute - Collection Jean Bernard Hebey, HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Tricycle
Anonyme
Métal peint, années 1930
Painted metal, 1930's
Petaluma, Ca, USA - Eames Institute -Collection Jean Bernard Hebey, HIDAC (Historical Industrial Design Archive & Collection)
Llyod Loom
En 1917, Marshall Burns Lloyd met au point, à Menominee dans le Michigan, un système de tissage qui lui permet de faire fortune.
Ni jonc, ni osier, il s'agit de vannerie fine et traditionnelle tissée dans une fibre révolutionnaire : du papier kraft travaillé à la manière d'une corde et armé d'un faisceau de fils d'acier. Avec ses formes modernes, son côté pratique, le mobilier Lloyd Loom entre dans les grandes demeures comme dans les plus modestes : table, chaise, fauteuil, coffre, desserte. Il envahit bientôt les hôtels, les restaurants, les bars, les salons de thé ou les country-club, de Brighton à Miami. Pour sa légèreté, il est adopté par les dirigeables - notamment le R 100 de Deutsch - puis les aéroplanes et les avions.
En 1920, Lloyd en vend les droits pour l'Angleterre à Frank Lusty et pour la France à René Duval et Pierre Mouronval. Ce mobilier tout à fait adapté pour les ponts des navires – sous la dénomination Fibracier – équipe les promenades des paquebots Champlain et Île-de-France à partir de 1926.
Si les formes et les charpentes des Lloyd Loom sont Art déco avant la lettre, énigme non résolue, leurs vanneries reçoivent, très souvent à partir de 1925, un décor géométrique : un jacquard losangé tissé ou seulement peint sur le dossier. Peut-être une influence de l'Exposition de Paris de 1925 ?
En 1930, Lloyd propose un fauteuil à charpente de métal, le « seaside », à structure d'acier en porte-à-faux. Il est commercialisé pour la première fois à l'Exposition internationale de Chicago en 1933.
Gaston Suisse (1896-1988)
Meuble bibliothèque à trois corps
Le mobilier de style « Gratte-ciel » doit tout à l'architecte, peintre, écrivain et designer américain Paul Frankl. Ce pionnier du modernisme outre-Atlantique participe à l'élaboration d'une esthétique proprement américaine. L'horizon de la ville l'inspire et, à partir de 1925, il s'appuie sur le motif du gratte-ciel pour revisiter une série d'objets usuels et crée des bibliothèques Skyscraper. Les pièces de la collection Skyscraper sont un véritable succès et Frankl renomme son entreprise Skyscraper Furniture en 1925.
Bois, laque noire, et laque enrichie de graphite, incrustation de poudre de coquille d'œuf tamisée, vers 1935
Collection Dominique Suisse